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Anaïs Nin, sur la mer des mensonges de leonie bischoff

Anaïs Nin est née en France de parents d’origine cubaine, « déracinée » après leur séparation en 1914, elle vit auprès de sa mère et ses frères et sœurs à New-York. Elle se marie au début des années 1920 avec Hugh Parker Guiler, jeune et prometteur banquier, et revient s’installer en banlieue parisienne à ses côtés. C’est là qu’elle fera la connaissance de Henry Miller…

Le parcours d’émancipation d’une femme hors du commun pour son époque et le milieu social auquel elle appartient. Jeune fille « de bonne éducation », Anaïs sent le manque et les limites qui la cloisonnent dans un personnage qui ne lui permet pas d’exprimer les différents aspects d’une personnalité complexe et profondément sensuelle.

Indissociable du « Journal » auquel elle s’astreint quotidiennement, sorte de miroir libérateur et sublimant de celle qu’elle aspire à être, elle s’ennuie et s’enlise pourtant dans un rôle d’épouse.

« Si je ne me crée pas un monde par moi-même et pour moi-même, je mourrai étouffée par celui que d’autres définissent pour moi. »

Sa rencontre avec Henry Miller agit comme une naissance à elle-même et libère à la fois la femme et l’auteur que nous connaissons aujourd’hui.

Des amants, des maîtresses, une sexualité sulfureusement épanouie, l’inceste, la danse, l’expérience de la psychanalyse et l’écriture, toujours l’écriture jalonnent ce portrait d’une femme libre, indifférente aux tabous et tumultueusement inspirante…

« Je peux maintenant aimer un homme comme un égal. Comme un amant et un créateur. Et je choisis d’être moi aussi le créateur.

Je ne serai jamais parfaite.

Je ne serai jamais une seule femme, ou l’amante d’un seul homme.

Je vais vivre ces multiples vies, explorer les milles facettes de mon être, et vivre avec passion, de toutes mes forces. »

Le dessin de Léonie Bischoff semble cousu sur mesure tant il est difficile en refermant ce roman graphique de ne pas imaginer la véritable Anaïs Nin telle qu’elle apparaît dans ses pages. Son coup de crayon sublime l’imagerie et les couleurs des années 1930, et l’érotisme et la sensualité qui se dégagent de ses planches sont d’une beauté lumineuse.

Un immense coup de cœur…

https://www.franceinter.fr/emissions/une-journee-particuliere/une-journee-particuliere-11-octobre-2020

L’école des soignantes, de Martin Winckler

Coup de cœur d’Elodie

Comme toutes les soignantes – et sans doute encore plus parce que j’étais un homme – j’étais arrivé en Psycho avec des préjugés silencieux, insensibles, insoupçonnés… Chez les folles j’ai compris que la folie, c’est tout relatif.

Un roman profondément humain, qui présente une utopie médicale visant à changer le petit monde des facs et centres hospitaliers, repensés en plaçant les soignées au cœur des démarches de soins et en formant les soignantes à l’humilité.

La brodeuse de Winchester, de Tracy Chevalier

Dans l’Angleterre des années 30, Violet Speedwell fait partie de ces femmes dites “excédentaires”, qui n’ont pas trouvé de mari suite à l’hécatombe de la guerre. Grâce à son petit salaire de dactylo, elle quitte sa mère et part vivre seule à Winchester. Dans la cathédrale de la ville, elle va s’intégrer à une communauté de brodeuses et découvrir le cercle, tout aussi peu connu, des sonneurs de cloches.

Un roman qui nous plonge dans une autre époque, sur les traces d’une femme déterminée à mener sa vie et à garder son indépendance malgré les conventions de l’époque.

Combien de pas jusqu’à la lune ? de Carole Trebor

Dans les années 1920, en Virginie occidentale, Joshua et Joylette habitent une modeste ferme avec leurs quatre enfants, à qui ils transmettent leur curiosité du monde et une dignité teintée de modestie. « Vous êtes aussi bons que n’importe qui dans cette ville, mais vous n’êtes pas meilleurs. », ne cesse de répéter le père. Katherine, la benjamine, passe ses journées à compter. Elle calcule le nombre de pas pour aller à l’école, mesure la hauteur des arbres, se questionne sur la distance qui sépare la Terre de la Lune… Grâce à ses capacités exceptionnelles, elle entre au lycée à 10 ans, puis obtient ses diplômes universitaires à 18. Elle commence ensuite une carrière de professeure, mais c’est un autre avenir qui l’attire…

Dans une Amérique où les droits des Noirs et des femmes restent encore à conquérir, elle trace consciencieusement sa route dans l’ingénierie aérospatiale à la NACA puis à la NASA. Et au fil des ans, malgré les réticences d’un milieu masculin marqué par la ségrégation et une forme de misogynie, elle prouve sa légitimité par l’exactitude de ses équations et l’ingéniosité de ses raisonnements. Et c’est à elle qu’en 1962, l’astronaute John Glenn demande de vérifier la justesse des calculs de sa trajectoire avant de partir en orbite autour de la Terre. Sept ans plus tard, on lui confie le calcul de la trajectoire d’Apollo 11. Objectif visé : la Lune. Dans l’ombre des hommes, Katherine fait, à sa manière, également décoller les droits des femmes et des Noirs.

Un superbe roman qui retrace le parcours d’une femme exceptionnelle.

Le chœur des femmes, de Martin Winckler

Jean Atwood doit exercer pendant six mois dans l’unité 77 du docteur Franz Karma, dédiée à la médecine des femmes. Une cohabitation qui promet d’être conflictuelle entre le médecin, attentif aux femmes, à l’écoute de ce qu’elles ont à dire, et l’interne, qui se borne à l’aspect clinique et est plein de préjugés.

Un très beau texte, profondément humain, qui donne la parole aux femmes, à ce qu’elles subissent, aux violences médicales dont elles sont victimes, dans un système de santé très déshumanisé.

Sans foi ni loi, de Marion Brunet

La vie du jeune Garett bascule le jour où une hors la loi en cavale le kidnappe et l’entraîne dans sa fuite. Ce fils de pasteur strict et violent tombe en fascination pour sa ravisseuse, femme indomptable qui lui fera découvrir le goût de la liberté.

Un roman captivant, entre western, roman d’apprentissage et d’émancipation, qui donne une belle place aux femmes dans cette société.

10 minutes et 38 secondes dans ce monde etrange, Elif Shafak

Alors qu’elle vient de mourir, l’esprit de Tequila Leila persiste quelques minutes. Cette prostituée turque se rappelle des moments forts de son existence, de sa naissance dans la campagne anatloienne jusqu’à sa mort dans les bas-fonds d’Istanbul.

Son histoire croise la route d’autres femmes en marge de la société et aux destins singuliers, à travers lesquels on découvre la Turquie des années 50 à nos jours.

Les toits du paradis, de Mathangi Subramanian

Le paradis, c’est un bidonville de Bangalore menacé de destruction. Y vivent des défavorisés, surtout des femmes qui combattent la pauvreté et la dureté de l’existence par leur solidarité, leur volonté de vivre, leur courage de se battre pour préserver le peu qu’elles ont. A travers le quotidien de cinq adolescentes et de leurs mères, on découvre une communauté marginalisée mais unie et déterminée.

Un roman lumineux et sans misérabilisme. Portraits de femmes fortes et courageuses qui luttent pour être elles-mêmes contre un gouvernement qui les rejette et des traditions qui les oppressent.

Des femmes aimées avec passion, abandonnées avec cruauté. Qui se réveillaient tous les matins les poings serrés, les genoux fléchis, prêtes à se battre. Qui voulaient à tout prix vivre.