Archives de catégorie : Pryscilla a lu

Malgré tout, de Jordi Lafebre

37 ans après leur première rencontre, Anna et Zeno se retrouvent, enfin. Par petites scènes, on remonte le fil de leur histoire d’amour, menée en parallèle de leur vies respectives, instants de complicités, de passions et de tendresses, jusqu’à leur première rencontre.

Ce magnifique roman graphique met en scène une belle histoire d’amour atypique. On remonte dans le temps sur leurs traces pour mieux reprendre la lecture dans le sens chronologique sitôt terminée !

Histoire du fils, Marie-Hélène Lafon

Coup de cœur d’Élodie

André est le fils de Gabrielle, mère lointaine et intermittente, avec ses silences et ses grands airs, et de Paul, père fantôme dont il apprendra tardivement l’existence. Mais il y a sa tante Hélène, qui l’a élevé comme un fils avec son mari Léon, et les cousines comme des sœurs, puis Juliette et Antoine.

Le récit déroule, en douceur et par petites touches, les moments forts de cette famille ancrée entre Lot et Cantal, ses bonheurs comme ses silences pesants.

Fin de saison, de Thomas Vinau

Coup de cœur de Pryscilla

« Qu’est-ce qui nous tient quand tout s’écroule ? »

Il existe des gens auprès desquels on se dit qu’on aurait toutes les chances de survivre à la fin du monde, Victor, n’en fait pas partie. Loser magnifique, fainéant jusqu’à l’art d’en vivre, bricoleur picoleur du quotidien, cet anti-héros ne nous vend pas du rêve. Reclus dans sa cave alors que les éléments se déchaînent, coincé entre la cuve à fioul et les cartons prêts pour le prochain vide grenier, avec pour seuls compagnons d’infortune un chien et Cono le lapin, ses chances d’être celui qui sauvera le monde et ses proches sont minces.

Dans ce roman où l’humour noir et l’ironie côtoient la poésie qui le caractérise, Thomas Vinau, nous livre les états d’âmes et réflexions d’un « monsieur tout le monde » confronté à l’effondrement. Évidemment, on s’y retrouve ! On aimerait pouvoir se convaincre que dans la même situation, on serait de ceux qui prennent les choses en main. Mais, il y a fort à parier qu’à l’image de Victor, bon nombre choisirait la gnôle et les conserves de grattons de canard.

Auteur génialement protéiforme, (romans, nouvelles, jeunesse et poésie entre autres) Thomas Vinau n’en finit pas de nous étonner. Ne passez pas à côté de ce livre, lucide contre pied à notre époque dopée à l’efficacité et aux résultats, vous sourirez, vous rirez et, même, vous réfléchirez !

Aux lecteurs charmés, à ceux qui ne le connaîtraient pas encore, à tous, le magnifique « Ici ça va » du même auteur est disponible aux éditions 10/18.

« Mais non monsieur, tu veux te plaindre, tac tac, on te fout une fin du monde. T’auras des bonnes raisons de chialer comme ça. Ah tu crois que le temps qui passe est une saloperie ? Tu vas voir qu’il y a pire mon cochon. Bien pire. »

Le blog de l’auteur, c’est ici : http://etc-iste.blogspot.com/

Isola, d’Asa Avdic

Coup de cœur de Pryscilla

2037, Protectorat de Suède. Après son difficile et très médiatisé retour de mission humanitaire, Anna Francis, mère célibataire, travailleuse acharnée, a bien du mal à retrouver sa place parmi les vivants.
Contactée par ses supérieurs hiérarchiques pour participer à une opération de recrutement classée secret défense, elle se retrouve accompagnée de six autres personnes sur une petite île déserte au climat hostile, Isola. Dès son arrivée sur les lieux, le rôle d’observatrice qui devait être le sien la place dans la terrifiante situation de témoin impuissant face aux étranges évènements qui se produisent. Saura-t-elle obéir aux ordres coûte que coûte ? Et parviendra-t-elle à quitter ce lieu si peu hospitalier ?

Dystopie et roman noir, le livre nous plonge dans un monde où la manipulation des esprits par les puissants n’a aucune limite lorsqu’il s’agit d’asseoir leur pouvoir. Ce huis clos implacable et tout en tension n’est pas s’en rappeler dans sa trame le classique d’Agatha Christie, (ex !) 10 Petits Nègres, revisité à la sauce suédoise.

Chavirer, de Lola Lafon

Coup de cœur de Pryscilla

1984. Les cours de danse à la MJC de Fontenay, Cléo, 13 ans, y consacre toute son énergie. Lorsque la très élégante Cathy la repère parmi toutes et lui fait miroiter la possibilité d’une bourse de la fondation Galatée pour réaliser son rêve, la petite fille est pleine de fierté. Des cadeaux, de l’argent, un milieu cultivé et raffiné jusqu’au déjeuner avec les membres du « jury » durant lequel elle devra faire preuve de « maturité ».

« Les doigts comme des insectes agacés (…), il suffisait de se tenir parfaitement immobile.»

Le conte de fées tourne au cauchemar, Cléo n’est pas choisie mais peut-être pourra t-elle retenter sa chance l’an prochain ? et en attendant, elle pourrait aider d’autres jeunes filles à obtenir la bourse en les présentant à Cathy… Le piège se referme et, pour ne pas déplaire, pour continuer à croire que le rêve est possible, Cléo endosse le terrible double rôle de victime et bourreau.

Ce qu’il se passe dans les 30 années qui suivront, ce sont ceux qui croiseront la vie de Cléo qui nous le raconteront. Yonasz, Lara, Nico et les autres rassemblent les bribes de sa personnalité et de son parcours, de la MJC aux paillettes des shows télévisés, des espoirs déçus aux moments plus doux, jusqu’à l’explosion du mouvement « me too ». Un projet de documentaire, des langues qui se délient difficilement et tout ce que chacune avait tenté d’enterrer revient enfin en lumière.

Un texte fort et pudique sur cette délicate question des réseaux pédophiles. Ce serait cependant réducteur de s’en tenir là… La danse et ses souffrances, la culture populaire des années 1980 et 1990, Derrida et Goldman en exergue du roman, les questions de la culpabilité, du pardon, de l’oubli, qui jalonnent la vie de ceux et celles « qui sont passés par là ».

Les dynamiteurs, de Benjamin Whitmer

Coup de cœur de Pryscilla

1895. Une bande d’orphelins menée par deux adolescents, Cora et Sam, tente de survivre dans le cloaque des bas fonds de Denver… Pas de quartier pour ces enfants laissés pour compte, il faut lutter pour manger et grandir en échappant au monde des « Crânes de Nœud » soit les adultes séparés en deux catégories : les putes ou les voyous.

« C’était que d’être adulte est en soi-même un genre d’arnaque. »

Lorsque Goodnight, géant au visage mutilé et muet, fait son entrée dans leur repère, Sam veut croire à une forme de salut… Mais, le jeune garçon se retrouve bien vite entraîné dans des affaires toutes aussi violentes que sordides et bientôt, face à l’engrenage dans lequel il a mis le doigt, Sam comprend qu’un premier mauvais choix n’est que le début d’une très longue série…

« Il y a une forme de salut dans le fait de haïr la merde qui est à l’extérieur de vous plutôt que la merde qui est à l’intérieur de vous. »

« La quintessence du noir » dit Pierre Lemaitre… Nous y sommes ! Sans pour autant rivaliser complétement dans la noirceur avec le précédent roman de Whitmer, Evasion (Collection « Totem », éditions Gallmeister) qui est un modèle du genre. Il y a du western dans l’atmosphère de ses pages et également un regard bienveillant, presque nostalgique sur les défavorisés. Une lecture qui ne laisse forcément pas indifférent entre hauts le cœur et moments de tendresse…

Entre fauves, de Colin Niel

Coup de cœur de Pryscilla

Martin, garde dans le parc national des Pyrénées, farouche militant anti-chasse et grand protecteur de l’ours, se lance dans une traque obsessionnelle suite à la publication sur les réseaux sociaux de la photographie d’une jeune femme, posant aux côtés du lion qu’elle vient d’abattre avec son arc… Des Pyrénées jusqu’à la Namibie, l’histoire se dessine entre ses êtres que tout oppose… Des hommes prêts à payer des sommes indécentes pour chasser un animal protégé, des villageois Namibiens prêts à tout pour protéger leurs troupeaux des prédateurs et indifférents aux cris des militants étrangers opposés aux « prélèvements » d’animaux sauvages…

La traque s’accélère d’un continent à l’autre pour laisser le lecteur « éberlué » par un final imprévisible… tout chasseur peut devenir une proie et la proie peut choisir de se rebeller…

Un bon roman noir, finalement bien mené malgré un début d’histoire un peu poussif…

Le sanctuaire, de Laurine Roux

Coup de cœur de Pryscilla

Un virus transmis par les oiseaux a mis l’humanité à genoux, une famille trouve refuge dans une cabane isolée dans la montagne et tente d’y survivre dans une nature à la fois rude et généreuse…

Gemma a vu le jour dans le sanctuaire, sans rien connaître du monde tel que nous le parcourons… June, sa sœur et Alexandra, leur mère, regrettent ce passé perdu, dont le moindre détail est magnifié à travers les histoires que racontent cette dernière. Le père, dur et intransigeant, convaincu d’agir pour la survie de « son clan », exige de ses filles obéissance et soumission et leur impose un entraînement véritablement militaire. Mais, cette vie (ou ce qui s’y apparente) de privations et d’interdits, exigée au nom de la sécurité de tous, se fissure peu à peu lorsque Gemma rencontre un vieil homme accompagné d’un aigle majestueux…

Un texte d’une grande force pour une lecture « coup de poing »… le premier roman de Laurine Roux, Une immense sensation de calme, annonçait déjà un réel talent et un univers littéraire singulier. Cette seconde publication confirme pleinement les qualités de cette auteure accomplie…

On pense à Mccarthy, dont une citation ouvre le roman, à Thoreau… et au percutant My absolute darling de Gabriel Tallent… Un vrai grand coup de cœur !

Betty, de Tiffany McDaniel

Dans l’Amérique des années 60, la petite Betty grandit dans une grande famille, entre un père indien et une mère blanche, marquée par une enfance difficile. Ils vivent en marge, pauvres mais riches de ce que la terre leur offre et des histoires du père, qui embellissent la réalité et rendent le monde meilleur en l’emplissant de beauté et de merveilleux.

Un roman puisant qui oscille entre dureté et poésie, porté par la voix d’une enfant hantée par la violence du monde et portée par la force ancestrale des femmes cherokee. Une héroïne qui puise sa force dans les mots et l’écriture face à la perte de son innocence, qui l’arrache brutalement à l’enfance.

« Non seulement papa avait besoin que l’on croit à ses histoires, mais nous avions tout autant besoin d’y croire aussi… Nous nous raccrochions comme des forcenées à l’espoir que la vie ne se limitait pas à la simple réalité autour de nous. Alors seulement pouvions-nous prétendre à une destinée autre que celle à laquelle nous nous sentions condamnées.« 

La fille du chasse-neige, de Fabrice Capizzano

Tom vit en décalage, avec son hypersensibilité qui lui permet de lire la nature des gens et nourrit avec brillance sa musique ; une fragilité transcodée en chants, en interprétation unique, de couleur à sons, de lumière à bruit. Il est entouré d’un patchwork de personnages entiers et attachants avec, au centre, Marie, la fille du chasse neige, l’apicultrice, et leur amour fort, lumineux, dévastateur.

Un premier roman frais et lumineux, enrobé de nature et d’amour, de couleurs et de musique, plein de vie, de ses beautés comme de sa violence.