Archives de catégorie : ♥ Vos libraires ont lu ♥

Border la bête de Lune Vuillemin

Elle brassait de la bière en dansant et Frank a perdu le rythme. Elle a voulu retirer les tiques de sa fourrure et l’orignale n’a pas survécu.
C’est un roman d’amour et de mort et de mort et d’amour. Au bord des lacs, sur les berges de Babine, dans la cabane d’Arden, au cœur de l’herbier sonore qu’elle compose avec Jeff, elle cherche le sens et sa place dans toute cette nature et, d’araignée en sapin baumier (chemins de coccinelles) ce qu’elle peut faire des sentiments qu’elle éprouve pour celle qui danse avec les coyotes, de cette lumière ambrée qui la talonne et de la bienveillance borgne qui éclaire ses pas.
L’amour, la mort, la jalousie, la colère…
Et la beauté.

La Contre Allée éditions, à paraître le 12 janvier 2024, 19 euros

Combien de cœurs, de Nawal El Saadawi

Petite fille empêchée par la tradition, la religion et la loi, corps adolescent convoité et dominé par les intérêts du patriarcat, soumis par une mère à la fois prisonnière et geôlière, l’héroïne refuse de se minimiser et de se soumettre.

« Je rejetterais ma féminité, je défierais ma nature, je résisterais à tous les désirs de mon corps… Je prouverais à ma mère que j’étais plus intelligente que mon frère, plus intelligente que n’importe quel homme et que je pouvais faire tout ce que mon père faisait et même davantage… Je prouverais à la nature que je pouvais vaincre ce corps frêle dont elle m’avait doté et ses parties honteuses, tant internes qu’externes. Je l’emprisonnerais dans une cellule que je concevrais à la force de mon intelligence et de mon esprit, et ne lui laisserait aucune chance de me reléguer au rang de femme illettrée. »

Elle décide de devenir médecin et « démystifie la masculinité à qui elle a eu affaire en tant que corps, un corps comme un autre, fragile, défaillant et mortel, dépendant de son savoir pour sa survie. »

Amadeus, de Gilles Vincent

Onze jeunes femmes ont disparu, aucune récrimination, aucun lien entre elles. Et pourtant… lorsque leurs corps réapparaissent, le tueur n’a pas frappé au hasard et fait passer son message. Il traque quelqu’un, et toutes les horreurs seront bonnes pour parvenir à ses fins. La police met tout en œuvre pour l’arrêter alors qu’une jeune photographe semble bien décidée à mettre la main sur lui avant tout le monde…

Un thriller qui ne se lâche pas, sur les traces d’un tueur en série aussi retors que manipulateur.

Malgré toute ma rage, de Jérémy Fel

Elles sont quatre jeunes filles, à peine sorties de l’adolescence, Chloé, Manon, Thaïs et Juliette s’envolent pour le Cap. Ce sont leurs premières vacances entre copines, et rapidement le rêve tourne à l’horreur avec le massacre de l’une d’elles. L’histoire se construit à travers plusieurs personnages liés d’une manière ou d’une autre à l’adolescente disparue, chacun renfermant son lot de vice et de noirceur.

« On ne connait jamais autant les gens qu’on le voudrait. Chacun d’entre nous abrite en secret son lot de tourments. »

Une plongée dans la noirceur de l’âme humaine dans ce roman addictif malgré l’horreur et la violence.  

Les voleurs d’innocence, de Sarai Walker

Sylvia, seule survivante des huit filles de la famille Chapel, voit son passé ressurgir malgré elle et la replonger dans son enfance, quand elle était encore Iris, lorsque tout a basculé avec le mariage de sa sœur ainée… Une plongée dans les années 50 aux côtés de ces jeunes filles qui tentent d’échapper à leur condition, au poids de l’héritage familial, de la folie maternelle, pour être libres.

« Cette histoire a des arrêtes déchiquetées, pourrait infliger de profondes blessures. Ce n’est pas une histoire que je peux raconter avec du fil et une aiguille, cousue à petits points bien nets. Ce sont des tessons ou rien. »

Laissez-vous entrainer dans ce roman gothique sur les traces de ces jeunes filles aux noms de fleurs frappées par un mal mystérieux qui les emporte au lendemain de leurs noces.

L’amour de François Bégaudeau

Lorsque Bégaudeau s’empare de la vie d’un couple ordinaire de la classe populaire française aux débuts des années 1970 et l’émancipe de l’atmosphère glauque et « plombante » à laquelle elle est souvent assignée… Presque un demi-siècle d’amour sur fond d’évolution de la société dans un livre court qui en peu de pages et de mots bien choisis donne la place à un quotidien fait de petites choses, sans grands éclats de vie mais débordant de tendresse…

Étraves de Sylvain Coher

Le Grand Inondoir a envoyé une partie de l’humanité sur les mers où la loi de la débrouille règne en maîtresse alors que « Culs-terreux » et « Pousse-cailloux », les pieds solidement ancrés sur ce qu’il reste de terre ferme enchevêtrée aux déchets, gardent jalousement leur lopins au sec et loin de cette vile engeance condamnée à l’errance.

À bord du « Ghost », « cargo gothique » peuplé d’une quarantaine de crève la faim, Petit Roux s’oppose à l’équipage, refuse de se soumettre et soustrait la dépouille de Câline, sa mère, aux papilles de ses congénères. Il choisit la fuite avec l’espoir chevillé au corps d’atteindre le jardin interdit et de lui donner une sépulture digne.

Récit maritime post moderne aux effluves de fable initiatique atemporelle… Traque et course poursuite sur l’océan dans laquelle le sextant côtoie les restes de panneaux solaires et les polymères à la dérive… Subtil mélange entre « Mad Max », un bon vieux « Waterworld » et « Pirates des Caraïbes »… Critique tout en relief des conséquences de nos choix de société et des travers de notre humanité… Un cocktail détonnant servi dans une langue aussi précise que gouailleuse… Une pépite atypique et savoureuse pour celles et ceux qui aiment intensément s’en laisser conter… 🙂

Actes Sud – 21.80 euros

Elles, par Kid Toussaint et Aveline Stokart

Elle est une adolescente en apparence comme les autres, mais bien vite elle laisse apparaitre de multiples facettes, renfermant différentes personnalités qui prennent tour à tour le devant de la scène. On suit avec plaisir sa famille, son passé mystérieux, sa quête d’identité et ses plongées dans son univers intérieur très riche.
Qui est Elle réellement ?

Une brillante bande dessinée, touchante et intrigante, qui interroge sur ce qui fait notre identité et explique très clairement la complexité du trouble dissociatif de l’identité (TDI).

Les terres animales, de Laurent Petitmangin

Après l’accident, dans cette zone irradiée devenue hostile, ils sont une poignée à ne pas avoir fui. Chacun ses raisons.

« Pourquoi rester ? Question interdite. On se contente de la circonvenir. Par quelques affirmations un peu débiles, c’est pas pire qu’ailleurs, au moins on est tranquilles, par de petites réassurances communes, puis, quand il faut dégainer le lourd : maintenant qu’on a commencé. Ce maintenant qu’on a commencé résume l’espèce de pacte qui nous étreint, il prévient de tout délitement. »

Marc, Alessandro, Lorna, Sarah et Fred ont trouvé un équilibre grâce à leur amitié. Jusqu’à ce qu’un évènement imprévu remette leurs convictions en question.

Un roman touchant et plein d’humanité qui nous entraine dans un lieu suspendu,, hors du monde et hors du temps.

Suite inoubliable, d’Akira Mizubayashi

Jeune et brillante luthière, Pamina se voit confier la réfection d’un violoncelle d’exception. Elle découvre une lettre dissimulée à l’intérieur, qui la plongera dans le Japon des années 44-45 et dans l’histoire du talentueux violoncelliste Ken Mizutani avec la grand-mère de Pamina, Hortense Schmidt.

« L’étrange et extraordinaire histoire du Pax animae par Hortense, de ce magnifique violoncelle qui était devenu pour elle l’ombre de son jeune ami, son mausoléé.[…] Elle avait mis dans son œuvre toute son âme, toute sa vie de luthière en même temps que tout son amour pour le jeune violoncelliste dont elle avait été séparé par la marche implacable de l’histoire. »

Un superbe roman qui nous emporte dans un univers de beauté musicale et de passions, plus forts que la folie guerrière et l’oubli du temps, capables de susciter, dans une « sombre période, le désir de résister ensemble à la torture infligée à l’esprit est plus fort que la peur. »