La fille du chasse-neige, de Fabrice Capizzano

Tom vit en décalage, avec son hypersensibilité qui lui permet de lire la nature des gens et nourrit avec brillance sa musique ; une fragilité transcodée en chants, en interprétation unique, de couleur à sons, de lumière à bruit. Il est entouré d’un patchwork de personnages entiers et attachants avec, au centre, Marie, la fille du chasse neige, l’apicultrice, et leur amour fort, lumineux, dévastateur.

Un premier roman frais et lumineux, enrobé de nature et d’amour, de couleurs et de musique, plein de vie, de ses beautés comme de sa violence.

Héritage, de Miguel Bonnefoy

Coup de cœur de Pryscilla

Dans la seconde moitié du 19ème siècle, la crise du Phylloxera en France frappe durement les viticulteurs, ainsi débute l’exil de la famille Lonsonier vers les prometteuses terres Californiennes. Le sort voudra que le premier exilé Jurassien de la famille débarque finalement au Chili avec 30 francs en poche et un pied de vigne arraché à ses parcelles moribondes… Mariages et naissances se succèdent, et les descendants de ce premier Lonsonier du nouveau monde n’auront de cesse d’aller et venir entre leur Chili natal et leur France d’origine au gré des deux guerres mondiales qui marqueront le 20ème siècle jusqu’à l’arrivée au pouvoir d’Allende et le putsch de Pinochet au Chili…

Une saga familiale pleine de rythme dont l’individualité et l’engagement des personnages marquent l’histoire de la famille et de leurs deux pays.

Ce qu’il faut de nuit, de Laurent Petitmangin

Il a élevé ses fils comme il a pu, seul, mais avec tout l’amour et l’attention qu’il pouvait leur donner. Ils grandissent, tracent leur chemin, avec leurs convictions qui leur ont fait prendre des chemins différents. Rester présent, malgré les liens qui vacillent et l’incompréhension. Et la vie qui les malmène.

Un premier roman fort et sensible, qui vous emporte. “Je pense que ça a été une belle vie. Les autres diront une vie de merde, une vie de drame et de douleur, moi je dis, une belle vie.

Nature humaine, de Serge Joncour

Coup de cœur de Pryscilla

De 1976 à 1999… de la grande sécheresse estivale à la tempête de décembre, les années Giscard et l’espoir suscité par l’élection de Mitterand, le terrorisme sur le sol national, les luttes écolos et les questions que posent le nucléaire, l’avènement de la grande distribution et la désertification des campagnes… La « petite » histoire d’une ferme familiale du Lot devient prétexte à dérouler la « grande » histoire nationale de la fin du 20ème siècle, dans toute sa complexité et ses contradictions.

Ce roman foisonnant, traversé par une passion amoureuse vécue en pointillés entre Alexandre, héritier presque malgré lui de l’exploitation familiale, et Constanze, sublime Allemande « échappée » de la RDA, étudiante engagée et idéaliste, dessine le portrait d’une France en plein bouleversement, idéologique, social, politique. Le jeune paysan, attaché à sa terre, naïvement convaincu de poursuivre la tradition familiale en toute simplicité, se retrouve bientôt entraîné dans un combat qui dépasse les limites de son monde… Et le projet de cette autoroute qui pourrait bientôt défigurer le paysage des terres familiales et remettre en cause le travail accompli par les parents et grands-parents, l’amènera à prendre des décisions radicales.

Un grand roman et un vrai coup de cœur… Joncour ne nous donne pas de leçons sur ce qui doit être pensé mais déroule intelligemment toutes les questions que pose la grande fuite en avant du sacro-saint progrès.

« Le progrès, c’est comme une machine, ça nous broie. »

Apprendre, si par bonheur, de Becky Chambers

Quatre astronautes sont en route dans l’espace pour explorer des planètes susceptibles d’abriter la vie. Au delà de la joie de la découverte, de la curiosité et de la fascinations pour ces formes de vies nouvelles se posent des questions éthiques : malgré toute leur bienveillance, l’exploration est forcément intrusive.

Un court roman SF atypique, profondément bienveillant, qui se veut réaliste et soulève de grandes questions.

Voici ce que nous voulons que vous vous demandiez : c’est quoi l’espace, pour vous ? Un terrain de jeu ? Une mine ? Qui doit y aller et dans quel but ? Devons-nous seulement y aller ?… Nous n’avons rien trouvé que vous pourrez vendre. Nous n’avons rien trouvé d’utile. Nous n’avons trouvé aucune planète qu’on puisse coloniser facilement ou sans dilemme moral, si c’est un but important. Nous n’avons rien satisfait que de la curiosité, rien gagné que du savoir.

Nickel Boys, de Colson Whitehead

La Nickel Academy est école disciplinaire destinée à “remettre les jeunes délinquants sur le droit chemin et les faire devenir des hommes honnêtes et honorables.” A la fermeture de l’école, des archéologues exhument des corps non déclarés, meurtris. Et Elwood se souvient de l’erreur judiciaire qui l’a conduit là-bas, des années plus tôt, bien loin de la réalité affichée : “l’école vous brisait, vous déformait, vous rendait inapte à une vie normale.”

Un roman basé sur une triste réalité, qui nous plonge dans les horreurs de la Floride ségrégationniste des années 60.

L’intimité, d’Alice Ferney

Une libraire féministe, célibataire par conviction, qui a décidé de longue date qu’elle ne serait pas mère ; un père architecte qui cherche une nouvelle compagne ; une enseignante fière de son indépendance qui s’est inscrite sur un site de rencontres. A travers leurs aspirations, leurs craintes, leurs choix, l’auteur illustre les différentes manières de former un couple, d’être un parent, de donner (ou non) la vie.

Entre dialogue philosophique et comédie de mœurs contemporaine, le récit ausculte une société qui repousse les limites de la nature et interroge celles de l’éthique pour satisfaire au bonheur individuel et familial.

Les lettres d’Esther, de Cécile Pivot

Lorsqu’Esther propose cet atelier d’écriture sur le thème de la correspondance, ils sont cinq à tenter l’aventure : s’écrire, se raconter, se confier comme on le fait plus facilement avec des inconnus. Chacun révèle sa part d’ombre, ses peurs, ses regrets mais aussi ses espoirs. Des inconnus qui ne se seraient jamais adressés la parole mais qui, au fil des lettres, se dévoilent se confient, apprennent à se connaître et à s’apprécier malgré leurs différences.

Un beau roman qui fait la belle part à la correspondance qui oblige à prendre son temps, à peser ses mots et à s’exprimer autrement. Comme un moyen pour ces personnes cabossés d’aller de l’avant en se confiant et s’entraidant.

Danse, Isadora, de Evelyne Brisou-pellen

Isadora est née dans une Amérique coincée dans des valeurs austères, dans une famille pauvre mais dont là mère laisse ses enfants grandir entre esprit d’aventure et débrouillardise, riches de tout ce qui fait la vraie valeur de la vie. La jeune fille aime danser en liberté et veut révolutionner la danse en faisant découvrir une nouvelle manière de danser et de laisser les corps d’exprimer.
Un joli roman qui retrace l’enfance d’Isadora jusqu’à ce qu’elle connaisse le succès et devienne la précurseure de la danse moderne que l’on connait.

Evasion, de benjamin Whitmer

Chronique de Pryscilla

Par une nuit noire et glaciale, à Old Lonesome dans le Colorado, une poignée de détenus parvient à prendre la clé des champs… L’évasion met le feu aux poudres dans cette petite ville où la prison est le principal pourvoyeur d’emplois et de revenus.

La traque s’engage, menée par un directeur aussi raciste qu’incompétent qui n’hésite pas à gonfler ses hommes aux amphétamines pour les lancer comme des chiens enragés sur les traces des prisonniers. Emportés par la violence des premiers événements, les habitants et des journalistes se mêlent à cette chasse à l’homme impitoyable… Ce n’est que le début d’une nuit cauchemardesque durant laquelle le droit et la morale n’auront plus le droit de citer…

Si Tarantino écrivait un roman, ce pourrait être celui-ci… Noir, haletant et sans concession jusqu’à ce que les premières lueurs du jour laissent apparaître les stigmates de cette nuit hors de tout contrôle.

Les frontières sont floues entre « les bons » et « les méchants » mais, derrière cette violence affirmée, Whitmer trace le portrait lucide d’un « trou perdu » de l’Amérique rurale, enfermé sur lui-même, dont les habitants, pris au piège d’un déterminisme social implacable, ont abandonné tout espoir d’en sortir un jour.

Tous prisonniers ? Sans doute… et finalement, bien peu d’évadés…

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