Archives de catégorie : Pryscilla a lu

« Belette » de Mye

« Ça sent la LIBERTEE. Allez, tais-toi et profite.« 

« Tu vas trop vite Belette ! T’as trop de choses à me dire ! Qu’est-ce que tu fais là ? Tu me tombes dessus comme ça, tu me presses. Tu sais, je t’ai vue et t’es restée dans ma tête ! Et puis, d’où tu sors d’abord ? Tu débarques à l’heure de l’apéro, comme ça, d’un coup, sans crier gare. Tu me descends de nulle part, sans détour, têtue comme une bourrique et déterminée comme un taureau. Le monde demande qu’à sombrer et toi, tu sauves l’enfance ! Tu sauves l’amour ! Tu sauves les fous ! Tu sauves les mouettes ! Tu me noies, clairement.« 

Belette a 13 ans et la cabosse avec son père et ses mousseuses, ça la connait. Avec Babine, sa bicyclette, elle prend le large le jour où Pierre, fesses-trop-hautes, manque son acrobatie à cause d’un baiser qui colle. Direction, le cimetière bunker et la Grand Plage où elle croise et recroise la femme Imperméable à la robe aux fleurs jaunes, Léon et ses sacs plastiques qui dansent avec les mouettes et le Mécano du Bon Dieu dans sa salopette…

Hymne à l’enfance, à la vie, à la joie qui résiste aux larmes, « Belette » est éclat de soleil dans le gris du ciel.

« Sur l’épaule des géants » de Laurine Roux

« Le temps malgré tout trouvera la solution malgré toi. »

Chez les Aghulon, les femmes, de mère en fille, sont des fleurs éperdument amoureuses et dotées de dons exceptionnels, les hommes se toquent de sciences et de techniques, les chats tiennent le crachoir et la dragée haute à tout ce joli monde.

Servez-vous un verre de « Aïthops Oinos » et, des Cévennes à Paris, de 1850 à 2001 suivez cette famille fantasque et fantastique dans ses pérégrinations historio-tragico-drôlatiques.

Où il faut aimer la vie, l’aimer même si, impossible de ne pas succomber passionnément à cette galerie de personnages hauts en couleurs et doués pour la vie.

Quatre romans publiés par Laurine Roux, un plaisir et une surprise sans cesse renouvelés. Une immense sensation de coup de cœur.

Bonne nouvelle, vous avez aujourd’hui le choix entre la magnifique édition illustrée par les gravures d’Hélène Bautista ou le format de poche à emmener partout !

« Quand le passé frappe à la porte » de Lucile G.

Une toute nouvelle collection « Place aux jeunes… » aux éditions du Piaf qui donne un espace d’expression aux plumes des ados, écrivains et écrivaines en herbe.

Ce premier titre signé Lucile G. est une petite pépite.

Huis-clos aux rebondissements aussi étranges que surprenants, ce texte bref et dense entraîne lecteurs et lectrices dans l’esprit torturé de Georges. Auteur en manque d’inspiration, il reçoit une visite qui va bouleverser complètement son rapport au monde et à son passé. Nous ne vous en dirons pas plus si ce n’est que la fin nous a laissé bouche bée avec l’envie d’en lire davantage…

Vivement la suite, Lucile G. 🙂

Prysc, Elo et Noémie, à l’unanimité, on a beaucoup aimé !

Si toi aussi, tu écris, n’hésite pas à envoyer tes textes aux Éditions Le Piaf.

« Le chant de la rivière » de Wendy Delorme

Des bouts de laine dans les ronces, des baignades dans un bassin de pierre rapiécé et des poèmes qui racontent l’amour d’un feu dont les matières inflammables peuvent éclairer sans brûler. Deux histoires d’amour qui se mêlent et se répondent, avec un ventre qui palpite de ses secrets cachés dans une bâtisse abandonnée, des boîtes et des albums photos qui surgissent quand les canalisations gargouillent pour dire tout ce qui a été brimé.

C’est la femme qui arpente les forêts, les ruines et leurs histoires oubliées qui raconte l’amour aujourd’hui. C’est la rivière douloureusement magnifique et vengeresse qui dit un amour d’avant, victime de la main des hommes, jalouse et cupide, qui écrase la joie dans les poitrines et assèche les méandres parce qu’il faut asservir pour ne pas perdre la face.

Mais, ils perdent, les hommes qui croient gagner. Les femmes et leurs amours sont aussi insaisissables que l’eau de la rivière entre leurs méchants doigts. Il faut lutter pour échapper aux muscles et aux tuyaux.

Après le temps du feu, de l’évaporation, voici le chant de la rivière, roman infiniment sensoriel, dans lequel les éléments s’incarnent, beaux et puissants, dans un peau à mots envoûtant.

Un grand coup de cœur pour ce dernier roman de Wendy Delorme. Venez ! On vous en parle (et des précédents également).

Éditions Cambourakis – 16 euros.

Harceleur de Arthur Ténor

Une terrible information annonçant au journal télévisé le suicide de la jeune Marilou, harcelée par des élèves de son collège, va complètement bouleverser le cours d’une soirée en famille. Le malaise du père est palpable et sa femme, Aurélie, va l’inciter à raconter ce qui provoque son trouble malgré les protestations de Lucas, leur fils de 13 ans, pour sa part impatient de s’affaler sur le canapé pour regarder un film. Quentin, aujourd’hui père de famille et adjudant-chef dans la gendarmerie, se retrouve plongé dans son passé et redevient le temps du récit cet élève du collège Brassens tour à tour harceleur, harcelé et protecteur.

Un excellent petit roman à lire dès 12 ans qui décortique avec clarté les mécanismes du harcèlement aussi bien lorsque les ados sont face à face que derrière leur smartphone à sévir dans le monde virtuel des réseaux. Sans être moralisateur, Arthur Ténor démontre les conséquences possibles de la violence lorsqu’une victime décide de se rendre elle-même justice et désigne, à travers le parcours de ses différents personnages, les portes auxquelles les jeunes confrontés à de telles situations peuvent aller frapper pour trouver de l’aide. Aucune place, celle du harceleur comme celle du harcelé, n’est définie pour toujours et le jeu des chaises musicales peut faire basculer les rapports de force toxiques, briser des vies et avoir de lourdes conséquences pour les ados et les adultes qu’ils deviendront.

C’est également un livre touchant et rempli d’une belle énergie, l’amitié qui se noue entre Quentin, ex-bourreau et Marvin, sa victime en classe de 5ème, autour d’une cause commune se veut porteuse d’un message positif de solidarité et de réconciliation.

Un mot de l’auteur et un entretien avec un principal de collège sont à découvrir à la fin de l’ouvrage. Même si la prévention et les moyens d’action en ce qui concerne le harcèlement scolaire sont encore largement perfectibles, la voie est ouverte…

Le Monde est à toi de Martine Delvaux

« On m’a souvent demandé ce que ça fait une mère féministe.

Comment je fais. Avec toi.

Mais je ne fais rien avec toi. Je ne cherche pas à faire de toi quelque chose en particulier. Je ne t’élève pas en tant que féministe. Il n’y a pas de discours, de mots d’ordre, de principes à respecter à tout prix. Il y a des mots que je te lance, et ceux que tu m’envoies en réponse aux miens. C’est dans cet aller-retour où on s’amuse à résister que quelque chose advient, et cette chose n’est rien d’autre que de l’amour.

Je t’aime et je vis avec toi, et ce qui m’importe le plus, c’est que tu existes. Que tu comprennes que tu en as le droit. Que tu saches, au plus profond de toi, que le monde est à toi. Qu’il doit être à toi comme il doit être aux autres. Que tu dois pouvoir y avancer librement. Ce qui veut dire y croire. Ce qui veut dire en faire partie, tout simplement, sans même penser que ça puisse ne pas être le cas. (…) »

Martine Delvaux est l’une des grandes voies du féminisme au Canada. Née en 1968, elle enseigne la littérature à l’université du Québec à Montréal et est autrice de nombreux romans et récits.

Dans cette longue lettre à destination de sa fille adolescente, Élie, Martine Delvaux débroussaille les chemins, semés d’embûches comme de petits privilèges, qui parcourent un monde complexe sans exiger que les pas d’Élie n’emboitent les siens. Les références multiples, de Ariana Grande à Bell Hooks, tissent la toile de fond de ce que cette mère a envie de transmettre à sa fille pour lui donner toute la force nécessaire à avancer dans  » (ce) monde qui ne mérite pas les enfants.« 

Liste de conseils, de recommandations et d’explications pleine de bienveillance et de compréhension envers cet âge de passage et de transition qu’est l’adolescence, ce livre est avant tout une grande déclaration d’amour d’une mère à sa fille.

Nous n’avons pas tous des filles, mais des mères oui ! Lisez ce texte à la voix universelle…

Éditions Les Avrils, 2022 – 17 euros.

S’arracher de Marc Daniau

« Et là tu sais. Elle chuchote, Papa s’est tué.

Et vous chutez, aspirés par le carrelage devenu immense jeu d’échecs. Pauvres Alices sans merveilles aspirées par l’outre-vie.« 

Dans une France « d’avant » où on servait du vin rouge aux élèves à la cantine, Lucas est celui dont le père, banquier, s’est suicidé. douleur et effondrement dans sa famille, silence et malaise des adultes, incompréhension de ses copains, Lucas enfourche sa mob et fuit pour oublier, pour voir la mer, pour être un autre et ailleurs.

La biche aux abois malmenée par les chiens de meute, trimballée dans un camion et relâchée, effrayée, pour devenir la proie d’une chasse à courre, fuit devant la puanteur des humains et de leurs chiens, le bruit, la violence.

C’est sur un pont que leurs chemins se rencontrent et que leur destin à tous deux se joue en un éclair.

Un texte court et pudique autour d’un ado, jusque là comme les autres, qui doit faire face au suicide de l’un de ses parents et retrouver l’envie de vivre et de continuer.

Une lecture forte pour les ados de 15 ans et plus.

Juste avant que de Joanne Richoux

« C’est quoi le sexe ? Si je me fie aux écrans, c’est réservé aux beaux. Est-ce qu’on est beaux, nous deux ? Est-ce qu’on va goûter à ce délire cosmique des gens beaux sur les écrans ? Ou est-ce une vieille tradition qu’on perpétue à cause des neurotransmetteurs ? Je suis amoureuse de lui, je le jure. Ses cheveux, sa dépression, ses cernes, ses chaussettes. Et si je ne l’aimais pas ? Et si c’était l’adrénaline ? L’ocytocine ? Les phéromones ? Pourquoi le sexe serait une affaire sérieuse ? Dédramatise. Pourquoi on ne pourrait pas niquer comme on cuisine du potimarron ? En pyjama, en rigolant, complices. Si ça se trouve on peut ? Dédramatise. »

Dehors, l’insurrection gronde. Il y a eu le réchauffement climatique, la crise énergétique, l’emprise des réseaux, des tirs sur une foule jeune et désarmée… Tandis que le monde dégringole, derrière les murs de l’appartement dans lequel ils se retrouvent presque tous les jours, deux jeunes gens s’aiment et se désirent. Rien n’est encore arrivé…

Avec leurs doutes, leurs peurs, leurs écorchures, leurs casseroles, ils se cherchent, se regardent, se racontent et se laissent emporter par leur désir, juste avant que…

Un texte éblouissant qu’on dévore avec la même urgence de lire que celle des deux personnages à se toucher. Il est question d’amour, de sexe, de politique et d’un désir qui ne tarit pas face au chaos.

Un grand coup de cœur pour ce texte de la collection « L’Ardeur » aux éditions Thierry Magnier pour toutes et tous à partir de 15 ans. Osez l’Ardeur !

Bobigny 1972 de Marie Bardiaux-Vaïente et Carole Maurel

« L’indécence, Monsieur le Président, ce sont ces femmes sur le banc des prévenues. Pas de raconter la réalité et la vérité sur ce que nous vivons. »

Les mots de Pryscilla sous la plume de Claire :

Cette bande dessinée raconte l’histoire du procès qui a permis à Simone Veil d’arriver jusqu’au Parlement pour présenter la loi de légalisation de l’avortement.

C’est un gros coup de cœur car c’est un sujet qui est au cœur de l’actualité. Il ne faut jamais relâcher notre vigilance car aujourd’hui rien n’est garanti. Comme le dit si bien Caroline Deyns dans MURmur «Toute loi est réversible». Nous avons aussi un devoir de transmission aux jeunes générations et cette bande dessinée y contribue.

Je l’offrirai à toutes les femmes que je connais, et en particulier à toutes les jeunes femmes. Je pourrai aussi l’offrir à des hommes un peu bornés sur la question. Sérieusement, c’est un livre à mettre entre toutes les mains.

Pour suivre les « Waouh de Claire », c’est par ici :

https://www.facebook.com/Leswaouhdeclaire

Miettes (humour décalé) de Stéphane Servant

« Depuis toujours on répète aux garçons : « Le monde est à toi, il t’appartient. » et ça justifie tout. Les guerres, les viols, les mains au cul et les humiliations.

Non mais, sérieusement, qui a décidé, un jour, que les dix centimètres entre nos jambes nous donnaient droit au pouvoir ? Au respect ? A l’amour ? Que les plus forts d’entre nous pourraient écraser les autres ?

Là, je me suis dit : c’est pas possible, en fait, c’est une blague !

C’est ça, ça peut être que ça : une mauvaise blague !

Une blague de mec, bien lourde, bien grasse et tristement ridicule. »

Fête de fin d’année au lycée, les numéros se succèdent sur scène et il attend, un peu mal à l’aise, dans les coulisses. C’est son tour et le message qu’il a à délivrer ce jour-là devant les autres élèves et les enseignants.es n’est pas tout à fait celui qu’il avait travaillé avec son professeur de français, Monsieur Almendra… Le voyage scolaire a laissé un goût amer dans sa gorge et il est bien décidé à briser le silence imposé par quelques siècles de toute puissance patriarcale et d’éducation genrée.

Le monologue percutant, drôle, grinçant, d’une lucidité frappante d’un jeune garçon qui s’en tape d’en avoir ou pas et qui en a ras le bol de garder sa souffrance, son indignation et sa colère pour lui.

La collection « Court toujours », c’est un roman en trois versions : Un format « papier », de l’audio et du numérique. Nos grands.es ados (à partir de 14 ans) auront le choix pour découvrir ce texte tout à fait génial.